Le regard de Dieu

Une célèbre fresque de Fra Angelico représente le Christ flagellé, les yeux bandés. En la rapprochant d’une parole du prophète Habacuc – « Tes yeux, Seigneur, sont trop purs pour voir le mal ! » (Hab 1, 13) – un théologien a défendu l’idée que Dieu ne peut voir le mal.

Pourtant nous pourrions objecter : Dieu ne sonde-t-il pas les reins et les cœurs ? Ne sait-Il pas que l’homme est habité par le mal ?

Comprenons. Dieu est le bien. Il est donc absolument pur de tout mélange avec le mal. Tel est le mystère insondable de sa sainteté.

Ayant créé l’homme à son image, Il l’appelle à cette même sainteté : « Il nous a choisi dans le Christ afin que nous soyons saints et immaculés sous son regard » (Eph 1) Dieu ne veut donc voir en nous que cette sainteté à laquelle Il nous appelle. C’est pourquoi lorsqu’Il nous regarde, Il se plaît à relever le bien qui nous anime : « Jésus s’était assis dans le Temple en face de la salle du trésor, et regardait comment la foule y mettait de l’argent. Une pauvre veuve s’avança et mit deux petites pièces de monnaie. » (Mc 12)

Le Diable, quant à lui, ne relève que le mal. C’est lui qui l’inspire à l’homme par la tentation, puis qui en accuse l’homme devant Dieu en Lui mettant devant les yeux ce qu’Il ne souhaite pas voir. Songeons au dialogue de Dieu avec Satan à propos de Job : « Le Seigneur lui dit : « D’où viens-tu ? » L’Adversaire répondit : « De parcourir la terre et d’y rôder. » Le Seigneur reprit : « As-tu remarqué mon serviteur Job ? Il n’a pas son pareil sur la terre : c’est un homme intègre et droit, qui craint Dieu et s’écarte du mal. » L’Adversaire riposta : « Est-ce pour rien que Job craint Dieu ? » (Jb 1)

Face à ces accusations incessantes sur les intentions de l’homme, Dieu décida de prendre Lui-même notre défense. Il envoya son Fils afin de ne plus nous voir qu’au travers du filtre de son visage innocent.

Comme Jacob qui se revêtit du manteau de son frère Esaü afin de cacher sa misère et accueillir la bénédiction de son père Isaac (Gn 27), nous devons nous revêtir du sang de l’agneau, nous « cacher en Jésus » afin que le Père ne voie en nous que la Sainteté de son Fils. Afin que nous devenions dignes de la face du Père et qu’Il puisse enfin poser sur nous son regard.

Oui, en Jésus, laissons-nous regarder par le Père. Il nous verra saint et immaculés !

Abbé Philippe de Maistre